C’est après avoir lu les billets de Victor, Laurent et Bertrand que j’ai eu à mon tour envie d’écrire sur le sens de mon travail, sur la perception des autres et sur le plaisir que j’ai à faire ce que je fais au jour le jour. En plus, la période de Noël est généralement assez propice à cela.
Ce n’est pas un secret, j’ai un parcours très différent des trois cocos mentionnés au début de ce billet. J’ai fait des études longues, pas tant parce que c’était mon plan à l’origine, mais parce que j’ai bossé pendant tous les week-ends comme poissonnier, ce qui m’a motivé à étudier pour trouver un travail que je serais susceptible de ne jamais regretter. Après ma thèse, je suis donc devenu enseignant-chercheur (tout en faisant des « ménages » en tant que consultant à coté). J’ai découvert le SEO en 2003/2004, en dilettante et principalement parce qu’avec Guillaume on gérait le site krinein. En tant qu’enseignant-chercheur, j’ai choisi un de ces métiers qui sont, en théorie au moins, utiles à la société. Dans la quête de sens que certains mettent en avant (comme Victor) par exemple, ce genre de job est en haut de la liste, avec la satisfaction double de faire avancer la science, et de former les jeunes.
Pourtant, au fur et à mesure des années, j’ai été de moins en moins heureux dans le milieu académique et j’ai choisi d’en partir (au moins provisoirement) en 2014. En même temps, le milieu SEO (et plus globalement le milieu du web), qui est moins porteur de sens d’une certaine manière, est beaucoup plus satisfaisant. Pourquoi ? parce qu’il y a une composante très importante : l’amusement au travail. Le milieu académique a perdu le « fun », les contraintes administratives et financières rendent les journées bien longues et bien loin du diptyque science & enseignement. A contrario, dans le SEO/web tout est amusant, on passe son temps à jouer avec des gros jouets : Google et le web, et c’est fun.
Actuellement, je m’occupe des ix-labs, et de mon point de vue j’ai le meilleur des deux mondes. Je fais de la recherche et je contribue donc toujours à l’avancée de la science (même si les applications sont plus importantes pour moi qu’auparavant), et en plus cette recherche c’est moi qui en choisit les objectifs, et je n’ai pas à quémander des moyens à des institutions totalement déconnectées des priorités de recherche, mais aussi des priorités de la société civile, des entreprises, etc. Par ailleurs, j’ai toujours une activité de formation, de dissémination, de vulgarisation, et de conseil. Bref, c’est le fun et le sens à tous les étages !
Voilà en vrac quelques uns de mes (petites) réflexions sur tout cela :
- Il faut être égoïste d’abord pour s’épanouir dans son travail.
Avant de chercher à être utile à la société ou à son entreprise, il faut trouver une satisfaction personnelle qui va pousser à continuer dans son travail. Pour moi, c’est le challenge de la nouveauté : trouver des solutions (algorithmiques généralement) à des problèmes divers, apprendre et voir des nouvelles choses, etc. Pour d’autres cela sera peut-être un tout autre objectif qui sera important comme voyager beaucoup, être au grand air, etc. Mais dans tous les cas il faut trouver le « fun » au travail.
- On ne peut pas plaire à tout le monde.
Vous aurez toujours des gens qui ne vous aiment pas, quelle que soit la raison qui les poussent à cela. Dans le milieu de la recherche certains collègues m’ont accusé de vénalité, d’être trop près de l’industrie, de faire du clientélisme (car les étudiants étaient plutôt positifs concernant mes cours). Ailleurs on m’a reproché d’être chercheur, et donc d’être quelqu’un incapable de faire quelque chose d’applicable. Dans tous les domaines, toutes les communautés (pareil chez les SEOs, les datascientists, etc.) il y aura toujours une poignée de personnes qui ne vous aimeront pas, ne vous en préoccupez pas.
- « J’aime mieux avoir des remords que des regrets. » Oscar Wilde
Ne vous limitez pas vous-même. Si votre situation ne vous convient pas, agissez pour qu’elle change. Ce sera peut-être long et difficile, ça sera peut-être un échec, mais vivre tristement toute sa vie n’est sans doute pas la meilleure des choses.
- Donnez vous les moyens de vos ambitions.
Je suis en phase avec Laurent : « c’est le plus acharné qui gagne » et « t’iras te chercher le respect ». Votre « devoir » vis à vis de vous-même est une obligation de moyens. Il faut bosser, il faut rebosser, et il faut rerebosser. Après, si un projet foire alors que vous avez bosser dur, et bien bosser, et bien c’est la vie, et c’est pas grave, ni pour vous, ni vis à vis des autres.
- C’est vous qui décidez du sens de votre vie, pas les autres.
Dans son billet, Victor dit « Ma vie est dénuée de sens car mon job ne fait tout simplement pas progresser la société et les gens qui m’entourent« . C’est une manière particulière de donner du sens à sa vie, mais elle est loin d’être unique. C’est à chacun d’avoir sa propre quête de sens, d’autant plus la notion même de progrès de la société est loin d’être claire, et est souvent propre à chacun.
Voilà, j’en ai fini avec mon billet approuvé par l’institut des philosophes et psychologues de comptoir^^. A ma décharge, 2015 fût une année compliquée, ceci expliquant cela.
Sur ce, un joyeux noël et n’abusez pas trop lors des repas !